Mon père est décédé ce week-end, un mois après ma mère, son épouse.
Il paraissait philosophe dans la vie, mais, bien qu’il n’en ai jamais parlé, ou, justement parce que jamais il n’en parlait, la mort devait particulièrement lui faire peur.
Ma mère, elle, en parlait souvent. Peut-être trop pour lui. Il trouvait une compensation en marchant beaucoup. Quand il n’a pu plus errer, pour des raisons de sécurité (il lui est arrivé de se perdre), c’est sa tête qui a amplifiée la déambulation, fonctionnant en roue libre, le faisant vivre dans un autre monde. Univers pas moins angoissant, mais ces tourments devaient, peut-être pour lui, valoir mieux que son appréhension de la mort.
Il n’a pu affronter le fait que son épouse décède. Bâtissant son déni sur des délires. Gravement malade il a été hospitalisé il y a une semaine et s’est retrouvé encore plus contraint physiquement, augmentant ses hallucinations.
Finalement, la veille de son décès, malgré que nous ayons quelque mal à le comprendre, on entendait bien qu’il nous questionnait sur sa femme, ce qui était assez nouveau. Avec mes sœurs nous avons pris la décision de répondre clairement à ses questions pour lui permettre d’affronter la réalité. Aussi pénible qu’elle fût. Nous lui avons répondu « tu sais où elle est », mais il ne voulait pas le comprendre, « nous te l’avons dit » et il s’accrochait à son déni tout en posant toujours la question. Le cœur serré nous lui avons rappelé que son épouse était morte il y a un mois. Les crises se sont amplifiées, criant « Dieu » et finissant par régresser pour prendre une voix de petit enfant pour appeler « maman ».
Et alors, le calme est revenu en lui.
Nous avons pu sentir qu’il lâchait prise, acceptait la réalité, consentait au chagrin. Et quelque terrible fut cette consternation, elle était plus libératrice que le déni. Il est resté serein, la respiration calme, lui qui avait passé la nuit précédente avec le masque à oxygène et des nébulisations d’un broncho-dilatateur pour l’aider à respirer. Il s’est endormi tranquillement. Ma sœur Catherine, est restée près de lui tout au long de cette dernière nuit. Sa respiration ralentissait pour finir par s’éteindre.
Adolescent mon père m’avait donné ses livres de poèmes qu’il avait lus adolescent, lui-même. Recouverts d’un épais papier grossier et jaunâtre, les noms des poètes maudits y étaient dessinés à la plume, en encres noire, bleue ou rose.
La violence de ses frayeurs face au sommeil éternel, m’ont fait retrouver le poème d’Arthur Rimbaud « Les corbeaux », où le poète est abattu devant les tueries de la guerre de 71 puis celles de la boucherie de la Commune de Paris où il s’était réfugié face à l’avancée des Prussiens. Il nous crie avec force de ne pas oublier ceux qui semblent être des perdants, des perdus.
Seigneur, quand froide est la prairie,
Quand dans les hameaux abattus,
Les longs angelus se sont tus…
Sur la nature défleurie
Faites s’abattre des grands cieux
Les chers corbeaux délicieux.
.
Armée étrange aux cris sévères,
Les vents froids attaquent vos nids !
Vous, le long des fleuves jaunis,
Sur les routes aux vieux calvaires,
Sur les fossés et sur les trous
Dispersez-vous, ralliez- vous !
.
Par milliers, sur les champs de France,
Où dorment des morts d’avant-hier,
Tournoyez, n’est-ce pas, l’hiver,
Pour que chaque passant repense !
Sois donc le crieur du devoir,
Ô notre funèbre oiseau noir !
.
Mais, saints du ciel, en haut du chêne,
Mât perdu dans le soir charmé,
Laissez les fauvettes de mai
Pour ceux qu’au fond du bois enchaîne,
Dans l’herbe d’où l’on ne peut fuir,
La défaite sans avenir.
.
Et face à la tranquillité retrouvée de mon père, alors qu’il nous avait dit l’après-midi qu’il se sentait proche de la mort, c’est un autre poème rimbaldien qui m’est revenu, un poème où la mort fait plus corps avec la nature à qui on demande d’en prendre soin, il s’agit bien sûr du « dormeur du val » que nous avons tous appris à l’école :
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.
.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert ou la lumière pleut.
.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouge au côté droit.
.
Cher Frédéric
Puis-je me permettre de déléguer à mon père, alors jeune homme de 17 ans, le soin d’écrire quelques mots pour le tien .. ?
« Pourquoi pleures-tu, mon âme ?
Dis-moi quel est ce dictame
Qui me fait venir les larmes aux yeux
Dis-moi, est-ce le hasard miséricordieux ?
Est-ce la haine de la mort ?
Est-ce l’amour qui est en tort ?
Pourquoi ces songes obscurs ?
Pourquoi toutes ces ordures
Qui viennent souiller mon esprit ?
De quelle erreur est-ce le prix ?
Pourquoi, pourquoi vivre
Dans cette vie, idiote et ivre
D’avoir si mal. »
Guy M., 8 décembre 1951
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Cher Frédéric,
Je prends connaissance de la triste nouvelle du décès de ton père, peu après celui de ta mère. Quand la mort touche nos proches toute la vie est bousculée.
L’existence se termine un jour. La vie touche à sa fin un jour. La mort est notre fin à tous. Même si on voudrait que la mort frappe aux portes de notre vie le plus tard possible, elle est inévitable et imprévisible.
Quelqu’un meurt,
Et c’est comme des pas
Qui s’arrêtent.
Mais si c’était un départ
Pour un nouveau voyage…
Quelqu’un meurt,
Et c’est comme une porte
Qui claque.
Mais si c’était un passage
S’ouvrant sur d’autres paysages…
Quelqu’un meurt,
Et c’est comme un arbre
Qui tombe,
Mais si c’était une graine
Germant dans une terre nouvelle…
Quelqu’un meurt,
Et c’est comme un silence
Qui hurle.
Mais s’il nous aidait à entendre
La fragile musique de la vie…
Je te souhaite tout plein de courage dans cette épreuve que tu traverses.
Toutes mes amitiés à toi et aux êtres qui te sont chers.
Bizzzzzzz,
Agnès
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Cher Frédéric,
Naissance vie mort, pour chacun c’est différent, les pages se tournent et c’est comme des nouveaux chapitres à chaque coup, si même nous en connaisons les termes, c’est à nous aussi d’en faire la découverte …
Je pense que ton papa à maintenant sa libération …
Bien à toi et à tes proches,
Nous t’embrassons.
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
La mort ,un changement
Pourquoi est’ il si difficile parler de la mort?
Pourquoi avoir si peur de regarder la mort en face?
Pourquoi le » mot mort, le mot cadavre » nous terrifie t’ il.
La mort est un vague mystère , il est certain , que nous mourrons tous, mais » quand ;comment » on ne sait pas!!!
Comme le dit « Sogyal Rinpoché » la raison de cette peur est que nous ne savons pas qui nous sommes.
Cette identité que nous nous sommes construit: Sur quoi repose t’ elle? Nous l’avons bâti sur du sable !
Si nous pensons qu’il n’existe rien d’autre? Que va t’ il nous arriver au moment de la mort ?
Frédéric toutes mes pensées vont vers toi et ta famille…reçois toute ma compassion.
Chaleuresement
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Cher Frédéric et ami,
Je viens t’adresser toutes mes sincères condoléances ainsi qu’à toute ta famille pour le décès de ton père et ami également puisque nous étions des anciens du Club wins.
Je garderais de lui un très bon souvenir car nous avions il y a quelques années fait ensemble une participation sur sa Ville de Tours dans le bulletin du club wins.
Et surtout je n’oublierais pas son « mot du soir » qui diffusait chaque jour sur la liste.
Qu’il repose en Paix.
Louis
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Je suis bien triste d’apprendre la mort d’Abel, pas vraiement surpris mais vraiment triste car l’un autant que l’autre étions plus prêt du tombeau que du berceau. C’est le seul membre du Club que j’aie rencontré physiquement à Saint Martin le Beau il ya cinq années environ. Nous avons échangé beaucoup au cours de ces vingt dernières années, des timbres sans doute mais aussi des réflexions partagées sur la mort et sur la foi. Je crois au paradis, nous avons certes nos qualités et nos défauts mais si Abel devait ne pas y être à la suite de je ne sais quelle erreur judiciaire canonique, alors ce serait trop injuste et je ne veux pas y aller non plus. – André Arasté.
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
« Et alors, le calme est revenu en lui »
Une formidable leçon de sagesse que t’a donné ton père ainsi..
Aller jusqu’au bout de sa peur..la traverser.
Se rendre Libre d’Etre.
De tout coeur avec Toi.
Lise
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Je souhaite mes condoléances à toute la famille!!!
Bisous
mélina
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Je crois à la vie après la vie car ce que nous appelons mort n’est que l’entrée vers une autre vie dont nous ne savons rien ou si peu et c’est cela qui effraie beaucoup d’entre nous. Je te joins un extrait d’un poème :
Mourir, au fond, c’est peut-être aussi beau que de naître.
Est-ce que le soleil couchant
n’est pas aussi beau si ce n’est plus que le soleil levant ?
Un bateau qui arrive à bon port,
N’est-ce pas un événement heureux ?
Et si naître n’est qu’une façon douloureuse
D’accéder au bonheur de la vie,
Pourquoi mourir ne serait-il pas
Qu’une façon douloureuse de devenir heureux ?
Quand ce sera mon tour de monter derrière les étoiles,
Et de passer de l’autre côté du mystère,
Je saurai alors quelle était ma raison de vivre.
Pas avant.
Mais le chagrin pour ceux qui restent est là quoiqu’on pense, quels que soient nos croyances, c’est douloureux.Je te souhaite de tout mon coeur plein de courage pour affronter ces tristes moments.
Je t’embrasse
Domy
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
A Frédéric et à sa famille,
L’arrivée au quai, est généralement accueillie avec satisfaction par le voyageur. Lorsqu’il commence son voyage, il sait que tôt ou tard il finira par arriver quelque part après maintes aventures. C’est ce qui vient d’arriver à Abel que nous apprécions tant.
Mais, la fin d’un voyage, c’est aussi le commencement d’un autre qui comme le précédent, nous emmène vers des aventures et une arrivée que l’on ne connait pas encore. Abel est en train de faire ce voyage que nous considérons ultime, car comme lui, nous n’en avons aucune idée.
André Arasté à écrit un jour « Il est impossible que tout ce que j’ai appris ne me serve pas dans une autre vie »
Prions donc pour qu’il ai eu raison afin que tout ce que Abel nous a apporté, lui serve et nous serve à notre tour lorsque sera venu le moment.
Et puis, pensez que Abel aura peut-être encore 2 vies, celle qu’il vient d’entamer dans ce nouveau voyage, et celle que vous allez lui créer dans vos souvenirs communs ou individuels.
Amicalement
André Cadiou
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
C’est avec beaucoup de tristesse que j’ai appris le décès de Abel Pierre. Nous étions au Club Win’s et j’ai souvent bénéficié de son aide en informatique. Je me souviens de ses « mot du soir ».
Je présente mes sincères condoléances à vous son fils et à toute sa famille et proches.
Yves de la Réunion
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
C’ est avec beaucoup de tristesse que j’ ai appris la fin matérielle de cet ami de tous. . Combien je regrette le grand vide que sa maladie avait créé lors des débuts de son départ du Club., Il a été , pour ce Club un adhérent modèle, qui n’ hésitait pas à calmer des débats parfois houleux avec une pondération admirable.Je souhaite beaucoup de courage à a famille car il ne sera pas facile pour elle de se séparer d’ une personne aussi exceptionnelle. Nous ne pourrons jamais oublier tout ce qu’ il nous a apport& au niveau des connaissances, de l’ amitié et de l’ humour.
Robert Garçon
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Bonsoir Frédéric
C’est avec tristesse que j’apprends la disparition d’Abel.
En tant que membre du Club Win’s, j’avais échangé un certains nombre de courrier il y a pas mal d’années avec lui du temps où les mails n’étaient pas encore devenu la norme et qu’il fallait prendre une plume pour pouvoir échanger des idées.
Toutes mes pensées sont avec vous et votre famille ce soir..
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Je ne sais toujours employer le mot « condoléances », je ne sais pas si c’est la dureté de ce mot qui ne lui donne aucun sentiment à mes yeux, je ne peux l’expliquer …cependant, je viens t’apporter mes pensées les plus sincères dans cet autre moment si particulier de la vie. Avec la description de ces derniers instants , Il vous a permis à tous deux de prendre un peu de distance sans doute face à un évènement si douloureux dont on ne connait pas les lendemains. Le fait d’être apaisé juste avant de partir atténue je pense le souvenir des moments douloureux et j’en suis heureuse pour vous deux. Je te pense assez fort mentalement pour continuer ton chemin en mettant à profit toutes les bonnes actions, pensées ou écrits qu’il t’a laissés . je t’embrasse
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Sincères condoléances. Dur de savoir qu’il affrontait des démons…Heureusement qu’il a pu retrouver la tranquillité.
Ma mère est morte il y a plus de 9 ans. En fait pour moi elle est morte 4 mois plus tôt quand j’ai cru la perdre en lui tenant la main à l’hôpital…Là j’ai fait mon deuil intérieur. Ensuite bien sûr la voir vraiment morte et si paisible et souriante m’a fait un deuxième choc.
Bon courage
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
J’ai écrit ceci, peut être tu y trouveras quelque chose…pour te faire passer le cap. Mon père est mort depuis 1977 lui, il est toujours présent en moi et dans mes rêves comme s’il était encore vivant ! Souvent dans mes rêves je lui demande « mais alors tu est en forme ? »
http://wp.me/P2Gz39-Ec
J’aimeJ’aime
Moi ça m’a fait pensé au film que l’on a été voir avec les enfants, il y a moins d’un mois « le jour des corneilles » où tu retrouves tout: la tristesse, la folie et l’acceptation. C’est un très beau film, on a beaucoup pleuré avec Liam et Nils et Aïko en ont eu une lecture plus légère!
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
Bonsoir Frédéric,
je comprends ta peine et je suis par la pensée en partage avec vous.
Ma belle-mère est morte cette année de la maladie d’alzheimer. Elle était en phase terminale, et ces derniers temps furent horribles : hallucinations, crises d’agressivité, perte de la marche, et même de la déglutition. Et puis elle est entrée en coma : nous lui avons parlé, ma femme et moi, et ma femme lui a donné l’autorisation de partir. Nous l’avons aussi rassurée sur le parcours qui allait être le sien quelques heures plus tard. Quatre heures plus tard elle mourait : nous sommes revenus, lui avons parlé à nouveau. Quand nous sommes partis, nous avons découvert avec étonnement que son visage était apaisé, détendu, elle souriait presque. Découvrir que les enseignements bouddhistes sur la mort sont vrais, que la mort peut être aussi une libération, ce fut un soulagement pour ma femme. Il n’empêche, faire le deuil est difficile : il ne faut pas songer à ce qui aurait pu être, il ne faut pas refaire le passé, c’est un vrai poison. Il vaut mieux aider la personne décédée par des pensées d’amour, par un accompagnement chaleureux de pensées reconnaissantes pour le bien qu’il a accompli de son vivant. La personne décédée le sait.
Christophe
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime
sincères condoléances………ne vais rajouter mot…….
J’aimeJ’aime
J’aimeJ’aime